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Un voyage au paradis des trams et des bus

Tramways, bus, trolleybus… Depuis plus de 50 ans, les bénévoles de l’association l’Amitram, basée à Marquette-lez-Lille, restaurent un patrimoine mécanique avec passion. Exceptionnellement, ils nous ont ouvert les portes de leurs ateliers pour nous faire voyager dans le temps.

Entre les allées, dans le hangar de l'association l'Amitram

Comme des gamins ! C’est dans cet état d’esprit que l’on entre dans l’immense hangar pourtant bien caché à Marquette-lez-Lille. Ici, des dizaines de trams et bus d’époque ont été recueillis, tels de vieux animaux de compagnie abandonnés par leurs maîtres. Trop vieux pour transporter dignement les voyageurs, ils attendent patiemment leur tour pour, peut-être un jour, bénéficier d’une rénovation minutieuse par les bénévoles de l’association l’Amitram (Association du Musée International des Transports Métropolitains).

 

Son président, Christophe Meurisse, nous accueille humblement avec deux de ses compagnons. Les trams, il les connaît bien : "Dans mon univers familial à Tourcoing, j'avais un grand-père conducteur de tramway et l'autre garagiste automobile. Autant dire que j’étais prédisposé à entrer dans l’association !" Depuis 2006, aux côtés d’une centaine d’autres bénévoles, il donne de son temps pour faire renaître ces belles machines.

Christophe Meurisse, président de l'association Amitram C. Arnould

Des trésors bien gardés

La motrice dont ils sont le plus fiers ? La A 201 de la Compagnie des Tramways de Roubaix et de Tourcoing (TRT), datant de 1894. Désormais d’un beau rouge flamboyant, elle a été entièrement remise à neuf pendant dix ans. Arrivée en 2012 à l’entrepôt, elle avait été transformée en tramway atelier depuis de longues années et n'avait plus rien d'origine hormis son châssis. Avec amour et patience, sous la supervision de Bernard Lepla le vice-président de l'association, les bénévoles de l’Amitram lui ont redonné vie : nouvelle caisse élaborée par les apprentis menuisiers du lycée professionnel d'Halluin, nouveau toit, réfection des assises, des peintures et même une cloche sur mesure ! Grâce au mécénat de compétences avec Ilevia (exploitante des transports de la Métropole Européenne de Lille), le recâblage électrique reliant perche, contrôleur et moteurs a été rendu possible.

On poursuit la visite avec la motrice 638 de l’Electrique Lille-Roubaix-Tourcoing. Tout de vert et crème vêtue, cette belle endormie de 1930 est à l’origine de la création de l’association. En 1968, la veuve d’un ancien directeur de banque contacte Claude Gay et Marc Breuze, tous deux spécialistes des trams. Elle leur ouvre les portes de son jardin au fond duquel, ô surprise, est entreposée cette énorme motrice ! "Si vous la restaurez, je vous la donne !" Tel fût à peu près l’échange de bons procédés qui séduisit les deux comparses. L’Amitram voit alors le jour, et la motrice, stockée ici depuis 1956 avec la fermeture des lignes intérieures à Roubaix et Tourcoing, est alors déplacée et restaurée avec passion.

La motrice A 201 de la compagnie TRT date de 1894 C. Arnould

En tout ici, 13 tramways ont été classés aux Monuments historiques. Mais le site abrite également une cinquantaine d’autres véhicules. Des trams, mais aussi des bus et des trolleybus. Des véhicules qui viennent essentiellement du Nord, mais de bien plus loin parfois… Saint-Etienne, Grenoble, Marseille, ou encore Bâle ou Fribourg en Suisse. Christophe Meurisse raconte : "Ici en 1984, le hangar était deux fois plus grand ! Les bus et motrices étaient garés en épis, il y avait un atelier menuiserie, un atelier mécanique, c’était plus simple de circuler". Puis une partie du bâtiment a été revendue, "il a fallu faire un tri, se séparer des véhicules les plus abîmés et nous recentrer sur ceux d’origine locale".

Désormais les bus sont à touche-touche avec les trams. On navigue prudemment dans les allées, émerveillé comme dans une cité perdue : ici un tram de 1936 comportant l’un des premiers fauteuils pour wattman, là un bus de 1969 de Valenciennes, puis le prototype 02 du fameux VAL de Lille, et vers la sortie, perché en hauteur, le Diabolo, un bus scolaire des années 80 en cours de rénovation.

Amitram C. Arnould

Passion patrimoine

"Dans l’association, nous avons chacun nos affinités, certains préfèrent les bus, d’autres les trams" explique son président. "Ici tous les métiers se rencontrent : menuisier, boucher, ancien directeur d’école, conducteur de bus, responsable des ressources humaines…", tous mus par la passion des belles machines anciennes. Certains sont spécialisés en mécanique, d’autres en menuiserie ou en électricité. Ils se retrouvent ici, selon leurs disponibilités, quelques heures par semaine.

Le bus scolaire Diabolo en cours de restauration C. Arnould

L’Amitram est désormais reconnue dans toute la France. L’association reçoit régulièrement des demandes pour récupérer de nouveaux engins à caractère historique. Elle a aussi noué des partenariats avec plusieurs entreprises qui lui font don de matériel, dont Ilevia qui les appelle systématiquement avant de se séparer de pièces détachées qui pourraient lui servir.

Côté projet, les bénévoles caressent l’espoir de pouvoir ouvrir bientôt un musée qui regrouperait les plus belles pièces issues de leurs restaurations. En attendant, à la belle saison, ils continuent de partager leur passion sur la ligne touristique de la Vallée de la Deûle qu’ils exploitent. Les visiteurs embarquent dans des Mongy de 1909 et de 1926, ou à bord d’un tramway de Bâle et font un aller-retour le long du canal, entre Marquette-lez-Lille et Wambrechies.

La ligne touristique du Val de Deûle P. Houzé

Crédit photo en-tête I. Dalle